Le nouveau miracle de Grunewald

 

 

 

 

 

 

Le Grand Hyver 1709

 

Considérés comme sacrés, les actes de Dieu ont toujours occupé une place prépondérante dans les religions. Sous ce prétexte, il était généralement mal vu d'en parler publiquement et interdit pour la classe populaire de les consigner par écrit. Édifié en dogme dans les fondations mêmes de la religion catholique romaine à partir de l'époque romaine, l'édile fut assuré par l'ensemble de la classe dirigeante jusqu'au début du 20e siècle, moment où la science moderne prit la relève, puisant l'appellation des phénomènes d'ordre naturel, à même la mythologie grecque comparable.

 

Ajoutées au fait que le peuple catholique était pratiquement illettré, très peu d'informations subsistent sur les phénomènes naturels d'importance survenus avant le 20e siècle. Le recoupement d'informations a néanmoins permis de mettre en relief certains évènements et certaines années, se démarquant par leurs importances. L'hiver 1709 est une de celle-ci. Comme l'hiver de 1708 fut très doux et que la température atteignait 10° en décembre, personne n'aurait pu penser que les mois suivants seraient si exceptionnels qu'ils plongeraient l'Europe dans le malheur.

 

La guerre est à toutes les portes d'Europe, alors qu'une intense chape de froid s'abat sur l'ensemble de la planète. Principalement ressenti en Europe, le froid descendit en dessous de -23°C, à Paris.

La première vague de froid eut lieu dans la nuit du 6 janvier 1709. Par bonheur, la neige permit d'épargner du gel, les cultures et autres récoltes. En 24 heures cette vague de froid s'étendit sur toute la France, on releva ainsi -25 °C à Paris, -17°C à  Montpellier ou encore -20,5°C à Bordeaux ! La Seine gela progressivement et on raconte que la mer elle-même commençait à geler sur plusieurs kilomètres de largeur!

Au château de Versailles, Louis XIV se voyait contraint d'attendre que son vin daigne bien dégeler près du feu, ce dernier se figeant rien qu'en traversant une antichambre! Les oiseaux tombaient en plein vol, les animaux succombaient de froid au sein des étables et le prix du blé ne cessait de grimper. Il valait huit fois plus cher que l'année précédente.

Tous les végétaux se mirent à dépérir, le sol gelant sur plusieurs mètres de profondeur; les oliviers, les vignes, et autres arbres fruitiers furent perdus pour plusieurs années. Les cheminées chauffaient mal et nécessitaient un important apport de bois, de toute façon beaucoup trop cher pour la population, laissant ainsi le vent glacial s'engouffrer dans les habitations faisant descendre la température jusqu'à -10 °C Partout en France on allumait de grands feux pour que les plus démunis puissent s'y réchauffer.

Lorsque le dégel eut lieu en avril, le constat fut épouvantable, toutes les récoltes étaient pourries. Le 23 avril, par arrêté royal, Louis XIV autorisa à semer à nouveau chaque parcelle de terrain. Les villes et communes taxèrent les bourgeois et les « riches » mensuellement pour pouvoir parer au plus pressé : la faim et le manque de nourriture. Tout le clergé en appela à la charité et à l'aumône. Hélas la famine se faisant ressentir, des émeutes et pillages commencèrent à avoir lieu dans tout le pays et les troupes furent envoyées dans toute la France pour empêcher les vols dans les boulangeries. Les paysans les plus chanceux étaient contraints de se nourrir de pain de farine d'orge, et d'une sorte de soupe populaire faite de pois, de pain émietté et de graisse animale...pour les autres, ce n'était que racines, fougères et mendicité, ce qui représentait une mort quasi assurée.

Ce qui n'était pas mort de faim, dut subir les foudres des grandes épidémies puisque l'été revenu, tous les vagabonds, paysans et autres gens sous-alimentés et affaiblis qui étaient partis sur les chemins de France pour tenter de trouver de quoi se nourrir et travailler, contribuèrent à la propagation des grandes épidémies de dysenteries, de fièvres typhoïdes ou encore de scorbut.

La France subira ainsi une crise démographique sans pareil puisqu'elle perdra plus du quart de sa population entre le premier janvier 1709 et décembre 1710, 810,000 habitants sur une population de 22 millions!

Au cours du même hiver, fait exceptionnel, la rivière Thames de Londres gelà a deux reprises. Ceci donna lieu à un fait inusité, mais de grands intérêts puisque l'auteur Jonathan Swift (1967-1945), celui même qui nous a fourni le mémorable conte "Gulliver à Lilliput" , nous apprend que dans une vieille édition des prophéties de Merlin, imprimées à Londres par Johan Haukyns au cours de l'année 1530, celui qui fut appelé Merlin l'enchanteur et qui vécut aux alentours du premier millénaire, avait clairement identifié la venue de ce phénomène climatique très particulier pour 1709. Il serait naïf de reléguer de telles déclarations dans la case prophétie ésotérique ou religieuse. Bien qu'elle puisse paraître surprenante et incompatible avec les préceptes de notre science populaire, il est tout à fait possible de déterminer le climat à venir par l'application d'une simple méthode de calcul que je démontre dans mon livre. Exactement la même méthode que celle utilisée par Merlin et beaucoup d'autres acteurs de l'histoire.

 

« Au grand dam des spécialistes de relations publiques déchirant leurs chemises pour l'acceptation du protocole mondiale sur le réchauffement climatique, il y a des moments ou la situation ne peut juste être résumée à des fumées de volcans ou des gaz à effets de serre. »

 

Des récits saisissants qui méritent l'attention. Pour beaucoup de gens du peuple de l'époque, tout ceci n'était rien de moins que la fin du monde.

 

Pierre De Châtillon, 11 novembre 2006

 

(Le texte fut partiellement traduit au français moderne aux fins de compréhension)

 

 

 

Ad perpetuam Vis memoriam (Pour que la mémoire des évènements dure éternellement)

En mil sept cent neuf, neufviesme onziesme et treziesme janvier, il fit un froid si perçant que de memoire d'homme l'on en n'a jamais senti un pareil. La neige resta trois semaines sur la terre presque tous les animaux des differentes especes moururent. Les Sangliers Cerfs biches perdrix Lievres (memes plumes) le bétail. Meme presques aux hommes furent trouves morts par le froid. Il se fit sentir dans toutes les parties du monde Car l'on apprit qu'en pologne Dannemark Espagne Portugal (Angleterre) dans Laflandre qu'il etait mort une quantite extraordinaire d'hommes . Les arbres detoutes espèces, la vigne meme s'est trouvée endommage de ce grand froid.  L'on ne vit jamais une annee plus rigoureuse. Le peu de grain qui s'était echappé a la violence et a la rigueur du froid fut entierement ruiné detruit et desséché par une gelée qui se fut sentie le lendemeint d'une pluie qui se durssissait en tombant par la rigueur du temps et se convertit en verglas qui ruina et moissona tous Les grains de tout.  
 
hyver 1709Le blé en mars 22 vaut vingt deux et la meture 18 louis Irrité l'on a fait forcé baillarge peut-etre que cela empeschera qu'on hausse le prix du bled au-dela de vingt deux livres l'on n'ecrit jamais pour la taille autres impositions revenus Le peuple ne fut jamais consterne. tout est estonne dans le temps que j'ecris de memoire. Dieu veuille donner un meilleur siecle que celui dans lequel nous vivons. en Juin Juillet Lameture monta a Vingt Livres le bled a Vingt quatre et vingt cinq livres. La quantite de pauvre est surprenante.
 
Le Vingt quatre De Decembre 1709 Le vin vaut Cent Ecus et quatre vingt le tonneau du blanc.
 
La guerre est plus allumee que jamais.
 

(En marge)

 Cela arriva le 22 vingt deux fevrier le verglas se fit le vingt deux fevrier qui fut la cause de toute notre perte

 

Paru dans Généalogie Magazine nº 14 de janvier 1984.

 

 

 

 

 

 

L'Hyver 1709 aux Essarts en Saintonge.

hyver 1709 aux Essarts

 

 

 L'an 1709 depuis Le sixième de Janvier jusqu'au 26 et depuis Le 25 fevrier jusqu'au dix de mars il a faict un hyver et froit si effroyable et inouy depuis peut estre plus de 4 ou 600 ans de sorte que Les plus gros chênes cerisiers et maroniers gelerent Les oyseaux moururent et surtout Les etourneaux <quoiqu'ils> se refugioist aux eglises et maisons.

 

 

 

 

 

Commune du Poitou.

1706 Janvier - Neiges abondantes dans l'est de la France. Juin - Grêle violente dans le sud-ouest de la France. Dysenterie en Anjou.

1707 Juillet - Caniculaire entre Seine et Loire, dans l'ouest et le nord de la France. Octobre - Inondations entre Seine et Loire.

1708 Mai - Vignes gelées entre Seine et Loire et dans le nord de la France. Octobre - Neiges abondantes dans l'ouest et le nord de la France. 13 mars ANDILLE : jour de mardy, la terre trembla entre quatre et cinq heures du matin au grand étonnement de tout le monde, les meubles des maisons furent écroullés dans le momant. Celui qui se fit il y a 4 ans arriva aussi un mardy un sixiesme jour de mars 1704.

1709 Famine .  "Le lundi 7 janvier 1709, lit-on dans une chronique de l'époque, commença une gelée qui fut ce jour-là la plus rude et la plus difficile à souffrir : elle dura jusqu'au 3 ou 4 février. Pendant ce temps là, il vint de la neige d'environ un demi-pied de haut : cette neige était fort fine et se fondait difficilement. Quelques jours après qu'elle fût tombée, il fit un vent fort froid d'entre bise et galerne (c'est-à-dire d'entre N et NW) qui la ramassa sur les lieux bas, ils découvrirent les blés qui gelèrent presque tous". Les céréales manquèrent, en effet, dans la plus grande partie de la France, et il n'y eu guère qu'en Normandie, dans le Perche et sur les côtes de Bretagne qu'on pût juste récolter la quantité de grain nécessaire pour assurer les semences ; aussi dans la région parisienne le prix du pain atteignit-il, en juin 1709, 35 sous les neuf livres au lieu de 7 sous, prix ordinaire. De nombreux arbres furent gelés jusqu'à l'aubier, et la vigne disparut de plusieurs régions de la France. Du 10 au 21 janvier, la température sous abri se maintint à Paris aux environs de -20°, avec des minima absolus de -23.1° les 13 et 14 janvier ; le 11, le thermomètre s'abaissa jusqu'à -16.1° à Montpellier et -17.5° à Marseille. L'hiver de 1709 fit ressentir ses effet sur une grande partie de l'Europe. L'Ebre, la Garonne, le Rhône et la Meuse gelés, mais la Seine resta libre ; au début d'avril, la Baltique était encore couverte de glaces. Aux dires de Réaumur et de Lavoisier, on n'avait jamais encore observé en France de froids aussi rigoureux que ceux de 1709. Mai - Vignes gelées entre Seine et Loire ; pluies abondantes dans le Centre.Juin - Pluies abondantes dans le centre de la France ; inondations entre Seine et Loire, dans le Centre et dans l'Ouest.

1710 Famine due à l'hiver rigoureux. Mai - Vignes gelées entre Seine et Loire, dans le sud-ouest et le nord de la France ; pluies abondantes dans le Centre. Novembre - Inondations entre Seine et Loire, dans l'est et l'ouest de la France. 19 mars, CHARROUX : fut enterré une jeune fille qu'on croyait estre du costé de nanteuil, asgée de 15 ans environ, morte à Châteauneuf chez le nommé Brandard. Il est mort trois autres personnes qu'on a pas pus trouver qui voulussent les apporter icy : la première une femme qui fut enterrée à la Croix de Rochemeaux, trouvée morte dans une roche (une grotte) près de là ; le second fut un homme asgé d'environ trante cinq ans qu'on croyait estre du costé d'Espenède, trouvé mort à St-Laurent dans le chemin et a esté enterré dans ledit cimetière ; et le troisième estoit un jeune homme asgé de dix huict ans ou environ trouvé mort dans le chemin de Rochemeaux et chez Dinet près le poteau et y a esté enterré. Pendant l'hiver 1709-1710, il est mort un très grand nombre de mendiants qui venaient à Charroux pour les aumônes qui y étaient faites. Ils étaient généralement enterrés dans le cimetière des étrangers. .../... Icy finy l'année 1710 qui a esté fort rude à passer aux pauvres, le bled ayant esté fort cher jusques après la récolte, de telle sorte que le froment a vallu plus de cent sols et le reste des grains à proportion. Mais le vin a esté à un prix excessif, ne s'estant point presque cueilly de vin, à cause d'une gelée qui arriva la nuit du dernier d'avril au premier may et continua dans la matinée. Le bled fut pourtant conserver par la miséricorde de Dieu et le prix fut fort modéré sur la fin de l'année et le fromant n'a vallu que trante huit sols à la St-Michel et trante quatre ou trante trois à la fin de l'année et le reste à proportion. Mais le vin du païs a vallu jusques à vingt escus la barique. Dieu en donne de plus heureuse, car les susides ont esté à excès. F. Sorin, prêtre et curé.

1711 Janvier - Neiges abondantes dans l'est de la France. Février - Inondations partout en France. Décembre - Inondations entre Seine et Loire et dans l'ouest de la France.

1712 Juin - Inondations entre Seine et Loire et dans le sud-ouest de la France ; grêle violente dans le Centre. Juillet et août - Rudes ; grêles violentes dans le sud-ouest de la France.

 

 

Montreuil-Bonnin.

Depuis plus de cinquante ans on avait pas vu une si terrible gelée que cette année 1709, qui commença le jour des roys, qui a endommagé les fruits de la terre, qui dura longtemps, qui a fait presque mourir tous les noyers, qui faisoit fendre les arbres, mourir les oyseaux, geler les bleds, froments et seigles et autre belds d'hiver. Il n'y eut que des bleds d'été, sçavoir baillarge et avoine ; toutes les denrées enchérirent à un prix excessif. L'année suivant il y eut bien des misères qui feront trembler les siècle à venir. Cette gelée dura plus d'un mois ; ce qui fit un grand tors, ce fut un petit dégel et un regel le lendemain. Toute la nature en fut étonnée...... les vignes se sont remises, et beaucoup d'autres choses, mais pour les noyers, on sera 100 ans à réparer cette perte. Il y eut des maladies étranges, tant cette année que la suivante, et il y en eut qui mourrurent de faim. Dieu nous préserve de semblables misères à l'avenir.

 

 

 

Saint-Martin-Lars.

Cette année 1709 a esté le plus long et rude hyver qui aye jamais paru. Le commencement a esté le six janvier environ, à midy, et a duré deux mois. Les neges ont presque duré autant par six reprises. Il est mort premièrement tous les bleds d'hivert et pour touttes mes dîmes n'ay eu de froment, mesure de Charou, que 15 boisseaux et autant de seigle ; resqu'autant d'éplatre ; d'avoine d'ivert point du tou ; orge environ demy cart, et on en a semé de mars, sans quoy l'ordre en serait perdu ; du froment quelqu'uns en ont semé de mars qui a bien venu. Les arbres fruitiers sont presque tous morts, entrôtres les noyers, et n'en a resté que des pettits, dans les petis noujerades des jardins ; la majeur partie des chasteigners morts aussy ; les pruniers en bien des endroits, cerisiers, pommiers et poiriers, mesmes jusques à bien des chaignes, entrôtres ceux qui ont esté etestés? Les arbres gelés etoint entrouverts pendant le grand froit. Touttes les perdrix.... ; les rouges sont touttes mortes, on en auroit point... n'étoit que... le reste le froid les tua... beaucoup de lapins que l'on trouvait mort sur les clapiers ; il mourut mesmes jusques à des veaux de deux ans que l'on peut jamais échauffer pour tout ce que l'on peut faire. Les hommes pensèrent geller de froid dans leurs maisons et entrautre dedens leur litd et y en mourut plusieurs ; les femmes enceintes se blessèrentou leurs enfants étant au monde ne se peurent sauver à cause des grands froids qu'avoient eu leurs aires. Les vignes geloient touttes, à la réserve des sept qui étoint couverts de neige, qui les garantirent des gellées ; sans cela elles auroint touttes été perdues, ce qui a été cause que le vin a Poitiers a valu le tonneau plus de 350 l; ; et en Angoumois et Saintonge 300 l. et davantage. Le bled froment, le boisseau mesure de Charrou 6 l. le boisseau, seigle 5 l. à la semence et davantage, l'avoine 25 s. le boisseau ; les pois et fèves ont suivi. Je certifie tout ce que dessus pour vray et ay signé de Charanton, curé de Saint-Martin Pour les pauvre, il ne s'est jamais veu pareille pitié. Le pain de froment vallu la livre 3 s. et le pain noir 2 s. la livre. J'oubliais à dire que le pain était tellement gellé qu'il fallait le scier avec un feillet. En bien des endroits on eut bien de la peine à pouvoir faire de la farine. L'on apprendroit mesme de mourir... a eu que de l'avoine et quelque... et baillarge en ces cantons ; mais... jamais il n'y a tant eu de baillarge... tant pain en ces lieux que d'avoine... qui sont trouvés merveilleux ; et cela a été comme la manne du Seigneur.

 

 

Mouterre–Silly. Remarques extraordinaires sur la présente année 1709

(source : Registre paroissial de Mouterre-Silly)

De temps immémorial on a vécu un froid si extraordinaire que celuy de la présente année 1709. Il commença le samedi au soir de 5 janvier, le lendemain, jour des rois, il fit un froid extraordinaire. Le lendemain, jour de la foire de Richelieu le froid fut si grand que le vin glaçait dans le verre auprès du feu. Les ruisseaux furent gelés à porter les chevaux. Le mardy le froid augmenta et le sang précieux gela à Claunay où je dis la messe, il tomba de la neige la nuit du mardy au mercredy qui bien loin de diminuer le froid ne fit que l'augmenter et dura toujours en s'augmentant jusqu'au 23 du même mois de janvier. Pendant tout ce temps, je veux dire depuis le 5 jusqu'au 23, le froid fut si é pouvantable que le vin gela dans les celliers et même dans plusieurs caves de Loudun, le pain gelait attaché dans la cheminée, il dégelait du côté du feu et gelait de l'autre. Il fallait avoir des fers chaux pour tirer du vin et il gelait en sortant du bussart. On trouvait les oiseaux, particulièrement les pinsons, morts dans les chemins, dans les maisons les pigeons entraient en foule dans les chambres et venaient mourir auprès du feu. La neige demeura sur la terre pendant tout ce temps là, mais il faisait un vent de bise si grand qu'il faisait voler la neige des maisons et des lieux auts dans les lieux bas qui auraient conservé les blés sans l'accident que je diray dans la suite. Le bois des vignes gela entièrement et d'une telle manière que le peu qui avait resté et qui avait été conservé soubs la neige produit quelque chose à la vérité, mais il vient ensuite des brouillards au mois de juillet qui perdirent ce qui avait resté de sorte que dans la dixme et dans les clos de Mouterre dépendant de la cure il n'y a eu qu'une buse de très méchant vin. Les vignes ont cependant poussé du pied et nous promettent demie vinée l'année prochaine. Tous les noyers sont morts, excepté une petite quantité de petits qui paraissaient vifs. Les deux tiers des arbres de toutes les espèces sont morts et ne poussent que un peu du pied. Les froments dans les hauts lieux comme Beaussay, Preuilly, Brou, Jalnay de cette paroisse, et aussi des autres lieux dans les autres paroisses ont entièrement gelé parce que la neige avait été poussée par le vent dans les fossés. Cependant, après le dégel qui commença le 23 et continua jusqu'au dernier jour de janvier, il paraissait que la racine des blés poussait un petit germe et on espérait encore recueillir du froment, et on commençait à se consoler des grands froids, croyant en estre quitte et pour moy je le croyais si bien que le dernier du mesme mois qui arriva le jeudy il fit un si beau jour et un temps si agréable que je fis faire mes grennes et mon jardinier qui accomodais mes planches estait mis en chemise et mouillait commeà la Saint Jean. Mais on fut bien surpris que le lendemain 1er jour de febvrier que le froid recommença et serra le terre comme auparavant, lequel froid dura jusqu'à la my febvrier qui acheva de geler le racine des blés. Il s'en faut pourtant de beaucoup que le second froid ne fust si grand que le premier car le pain ne gela presque pas non plus que le vin, mais comme le dégel avait humecté les racines du blé et que la gelée vint fortement là dessus, il ne s'est pas cueilli presque de froment dans les hauts lieux. Les légumes et les …… ? ?….. des jardins gelèrent entièrement et on avait que des ognons pour se servir qui valaient à Loudun 20 sols le boisseau. …….. ? ?……. les labourèrent où ils avaient mis du froment pour y semer de la drogée, ou baillarge, qu'ils ont acheté 22 sols le boisseau, laquelle baillarge a produit au-delà de l'imagination en sorte que leur cueillette de baillarge leur a valu au moins deux cueillettes de froment. Un gentilhomme digne de foy m'a dit que dans 20 septiers de baillage qu'il avait semé dans les terres où le froment avait gelé, il en avait cueilli 1000 septiers. Le blé fut fort cher, deux et trois mois après la gelée on vendait le froment 55 sols et encore n'en trouvait t-on pas. Mais il vient au mois de mai une déclaration du Roy qui ordonna que on porterait au marché le blé nécessaire, et pour lors les marchés en regorgèrent et il a toujours valu et vaut encore à présent 40 sols le boisseau de froment. Il est à remarquer que dans les bas pays comme à Silly, et dans le marais les froments s'étaient conservés soubs la neige et on espérait en cueillir au moins double semence, mais il vient au mois de juin, sur la fin, pendant que le froment estait en fleur, car il fleurit fort tard, il vient des gelées le matin et des brouillards qui les perdirent entièrement et il ne devient pas plus gros que de petit seigle et en très petites quantités, et qui a beaucoup incommodé les particuliers ne pouvant plus y mettre de baillage.

 

 

La Pélerine, 49, registre paroissial: "...la rigueur du froid, qui commença le 6 janvier..."

Beaucouzé, 49, registre paroissial: "...mais le 6 janvier après, jour et feste des Roys, environ midi, le vent se tourna au haut nord..."

St Georges Chatelaison, 49, registre paroissial: "En cette année 1709 tout le royaume fut désolé par la rigueur de l'hiver. le froid commença le jour des Rois..."

Cuon, 49, registre paroissial: "Le 6 janvier de la présente année a commencé le froid,..."

St Martin de la Place, 49, registre paroissial: "Le 6 janvier le froid qui commença fut si grand..."

St Germain des Prés, 49, registre paroissial: "Le grand hiver commença le 6 janvier ..."

Cantenay Epinard, 49, registre paroissial: "Le 7 janvier le froid commença avec tant de violence ..."

Lasse, 49, registre paroissial: "Le lendemain des Rois 1709 il y eu le commencement d'un hiver si rigoureux..."

Cherré, 49, registre paroissial: "Le 5 janvier 1709 le temps se refroidit extrêmement..."